Extrait de mon autobiographie encyclopédique
Le mot ARBRE
C’est le premier mot que je note dans la première colonne quand je joue au baccalauréat avec les enfants. Je gagne à tous les coups et ils râlent à tous les coups, de ne jamais finir avant moi malgré l’avance que je leur laisse !
J’adore les arbres.
Peut être est-ce le souvenir de ces balades en forêt de Fontainebleau que je faisais avec mes parents et plus tard avec mes enfants…
En tout cas, cette forêt est une des choses que je regrette de ma région natale.
La première grosse tempête qui s’abattit sur la France pendant à Noël 1999, alors que nous étions en Ecosse, me laisse un souvenir amer quand, à notre retour, nous avons traversé un paysage dévasté. J’ai pendant quelques années d’ailleurs versé mon écot à la fondation arbres et jardins, qui avait entrepris de sauver des jardins et des forêts.
Depuis ce drame, les propriétaires des maisons autour de chez nous, ont pris l’habitude d’élaguer leurs arbres et d’abattre leurs pins. On devrait plutôt parler de massacre tellement les arbres ne ressemblent plus qu’à des troncs aux moignons trop courts pour s’appeler encore arbre. A chaque balade aux alentours, je râle contre ces tronçonneurs du dimanche. Je ne pense pas, un jour, m’habituer à ne plus pouvoir admirer la plénitude d’un arbre, paré de sa majestueuse beauté.
Quand je suis partie en Angleterre, j’ai été saisie par la magnificence des arbres dans les jardins publics ou les parcs. Nulle part ailleurs j’ai retrouvé ce sens esthétique paysager fait à la fois de liberté soignée et de respect de la nature. Je me suis amusée de lire des panneaux de circulation accrochés aux arbres sur les trottoirs « Low trees (Arbre bas) » à Londres. Ils ne coupent pas les branches, mais préviennent les automobilistes que s’ils empruntent cette voie il faut tenir compte de l’arbre.
Dans mon jardin, il y a des pins, des chênes, un chêne vert, des chataîgniers, des lauriers cerises et un laurier sauce, des acacias qui se marient avec de magnifiques prunus, un sapin, trois bouleaux, un épicéa, des pruniers qui n’ont jamais donné de fruits et deux cerisiers qui nous offraient chaque années quelques cerises amères immangeables.
Après quelques temps, nous avons planté deux cyprès, un eucalyptus, un lilas et un olivier. J’aime l’eucalyptus avec le tronc qui se dépiote, laissant une écorce odorante rappelant les forêts que j’ai traversées dans les calanques de Piana, en Corse. Le pauvre arbre que nous avons planté a subi un désagrément dont il ne s’est jamais remis accusant désormais une courbure qui l’empêche de s’élancer bien droit vers le ciel. C’était un soir de solitude, lors d’une des nombreuses crises qui traversent nos existences. J’avais, comme je le fais dans ces moments là, décidé d’oublier mon chagrin dans une bouteille d’alcool fort. Ne buvant jamais d’alcool, je ne mets jamais longtemps à perdre ma lucidité. Après avoir donc ingurgité la dose nécessaire à mon endormissement cérébral, je suis sortie en nuisette dans le jardin et j’ai enjambé le tronc encore jeune de l’eucalyptus pliant le pauvre arbre sous mon poids. Nelson m’a retrouvé à califourchon sur mon arbre. L’arbre ne s’est pas redressé et il a fallu le tutorer sévèrement ! Quant à l’olivier, c’est une belle et douloureuse histoire.
En 2003, au décès de Pierre, mes amis et parents cherchaient un cadeau d’Adieu à Pierre. Je leur ai proposé de participer à l’achat d’un olivier, arbre de paix par excellence, rattaché à l’histoire de Jésus de surcroît. C’est ainsi qu’on acheta un olivier, choisi avec soin, qu’un pépiniériste a transplanté dans notre jardin. Il est le gardien de la mémoire de Pierre, présidant le coin de jardin, où des fleurs et des plantes, offertes en hommage à mon fils, agrémentent au fil des années cet espace de souvenir. J’ai appris pendant mon séjour à Londres, que traditionnellement, les familles juives plantaient un olivier, quand ils le pouvaient à l’entrée de leurs demeures.
De nombreux mimosas poussaient librement sur notre terrain, prenant de plus en plus leur aise, envahissant chaque année davantage l’espace. La solution a été d’aménager un chalet qui depuis trône en lieu et place des mimosas sauvages. Regrettant malgré tout la floraison odorante de ce magnifique arbre, nous en avons replanté un, acheté chez un paysagiste, en le plaçant plus près de la maison. Un hiver plus rigoureux qu’à l’accoutumée a ravagé de son gel destructeur son feuillage ciselé argenté et il a fallu l’élaguer fortement. Aujourd’hui, il peine à retrouver sa beauté d’antan, alors je patiente…
Bien qu’étant amoureuse des grands espaces austères que j’ai pu admirer au cours de certains de mes voyages comme le désert d’Atacama, l’Altiplano, la Sahara ou encore le plateau castillan, je ne peux envisager de vivre sans aucun arbre autour de moi. J’ai besoin de cette connexion. Il offre toute l’harmonie et la plénitude qui nous fait communier avec la nature.
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