LE SOUVENIR NARRATIF AUTOBIOGRAPHIQUE

L’écriture libératoire

Dans le cadre des récits de vie que j’entreprends avec certains de mes clients, je suis confrontée quelquefois à raconter l’indicible, souvent des violences vécues pendant l’enfance ayant aboutie à la mort de l’identité psychique.
L’écriture, et particulièrement la narration autobiographique, est reconnue comme un puissant remède pour se reconstruire.
Je vous propose donc l’ extrait d’un livre particulièrement pertinent sur cette question

LE SOUVENIR NARRATIF AUTOBIOGRAPHIQUE

EXTRAITS DU LIVRE « Le soi hanté – Dissociation structurelle de la traumatisation chronique» Onno Van der hart, ellert RS Nijenhuis, Kathy Steele. Traduction François Mousnier- Lompré. Edition DE BOECK

Livre proposant une étude approfondie du traitement de traumatismes chroniques, en proie à de violents conflits intérieurs, souvent liés à un passé douloureux. J’ai choisi cet extrait relatif au récit autobiographique, un des outils préconisés pour déconstruire son histoire afin de permettre à la mémoire narrative de se reconstruire une identité meurtrie.

« La mémoire narrative, ou mémoire épisodique (Tulving, 2002), a été décrite comme une  « fonction de la personnalité vivante » (Schachtel, 1947, p. 3). La mémoire narrative autobiographique ajoute ainsi de la cohérence à notre personnalité au fil du temps et des contextes successifs… …La mémoire narrative n’est certainement pas une bande vidéo des événements, elle est plutôt reconstructive par nature. Un souvenir reconstruit est condensé et symbolisé…
…Le souvenir narratif remplit des fonctions sociales et relationnelles. Il sert de lien entre les êtres humains ; c’est une façon pour l’individu de se faire connaître des autres, et c’est aussi une façon de faire des prises de conscience personnelles…
…Janet (1919) notait qu’un souvenir autobiographique, « […] comme tous les phénomènes psychologiques, est une action : elle consiste essentiellement dans l’acte de raconter » (p. 272). La création d’un souvenir autobiographique se compose de deux types d’actions mentales (Janet, 1928a) : 1) perception, encodage, et stockage des actions mentales et comportementales pendant l’événement originel, et 2) rapport (récit) parallèle de ce qui s’est produit. Ce sont ces actions mentales qui assignent l’expérience et sa signification au souvenir : « Il arrive ceci et cela, et je ressens cela, et je pense cela, et cela veut dire ceci et cela pour moi en tant que personne, et cela affecte mon comportement de telle et telle façon. » Lorsqu’on se rappelle ses expériences personnelles, on s’engage plus ou moins dans ces deux types d’action mentale….

Tout ce qui précède revient à dire que retranscrire son histoire n’est pas une démarche qui tend à restituer des faits mais bien plutôt à comprendre le rapport que le sujet entretient avec cette histoire. C’est en ce sens que l’écriture libère le sujet de son passé pour l’aider à se reconstruire et à se projeter un avenir.

C’est pourquoi il y a dans ce travail une notion de ressassement, de creusement sur les faits mais surtout sur les ressentis qu’il convient de mettre à jour pour travailler sur les causes d’incompréhension et de blocages que le sujet écrivant met à jour.

La mémoire se batit sur la blessure, le disjoint, l’hétérogène nous dit Jacques Derrida dans « tourner les mots. Au bord d’un film », Gallilée-Arte, 2000

Dans l’écriture de soi il y a l’idée de réaffirmation, de reconnexion avec un espace à redéfinir et de ramener à la conscience ce qui avait été mis de côté, souvent pendant longtemps,  mais qui est toujours présent en soi.

Être accompagné dans cette démarche permet une distanciation, une parole neutre qui élargit, invite à regarder l’évènement autrement, à positiver pour mieux rebondir.

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